Réflexion #3 : l’anthropomorphisme ou la volonté de doter nos chevaux de sentiments.

Bonjour à tous, je suis ravie de vous retrouver aujourd’hui dans ce nouvel article qui clôture le mois d’Avril. Pour cet article un peu particulier, j’ai pris mon temps. Oui, j’ai pris le temps d’observer, de noter, de réfléchir, de gribouiller, de recommencer, encore et de me poser vraiment des questions utiles. Cet article, c’est un peu la base à laquelle je reviens, qui me rappelle que ma passion me lie à un autre être vivant et que ce dernier n’est pas un Homme. Sors tes lunettes, prends ton plaid, on va aujourd’hui voyager dans un monde mystérieux et effrayant : celui de l’anthropomorphisme.

Mais de quoi tu parles ?

Alors, avant toute chose, mettons les choses à plat, comme j’aime si bien le faire ! Qu’est-ce que ce mot, barbare au possible, que j’emploie ici ? Nous aborderons uniquement la vision philosophique et non religieuse de ce mot.

D’après Universaelis : “ce terme peut désigner l’acte de doter quelque chose de la forme humaine : créer de toutes pièces un objet ayant forme humaine au sens plastique du terme, ou revêtir un objet déjà existant de forme ou d’attributs humains.”

Ou encore le CNRTL : “Tendance à se représenter toute réalité comme semblable à la réalité humaine.” Si on reprend la base étymologique du mot grec, on obtient littéralement : “à forme humaine”.

Et pour terminer, la vision d’un dictionnaire grand public, l’Internaute : “Tendance à attribuer aux animaux des sentiments humains.”

Ce qui ressort de ces définitions, c’est le fait d’attribuer des émotions ou des sentiments humains à des animaux (ou objet). De manière plus imagée, c’est se dire que notre cheval (qui vit au pré par exemple) à froid car il gèle dehors et que nous avons mis un manteau. C’est faux ! Et si tu en doutes, je te renvoie vers mon article vers le froid qui t’explique que, tout de même, la nature est bien faite !

Article 20.2

Et dans la vrai vie, ça donne quoi ?

Dans la vraie vie, c’est valable pour tous les animaux. Ce n’est pas uniquement dédié aux chevaux ou aux singes par exemple, c’est vrai pour tout ce qui n’est pas humain. Et nous, en tant qu’humains, nous avons une fâcheuse tendance à tout ramener à nous, à nous approprier des endroits et des droits sur des choses ou des animaux qui ne nous appartiennent pas ou encore de prêter des sentiments humains aux animaux.

Non, lorsque tu donnes une friandise à ton cheval avant une séance, il ne va pas mieux se comporter. Il va simplement savourer sa friandise et ne pas faire le lien avec ce que tu attends de lui dans dix minutes. Notre notion du temps n’est pas la même et lui n’anticipe pas sur aussi longtemps. Il peut anticiper sur une demande récurrente comme donner les pieds ou déplacer ses hanches (car il l’a appris), mais il ne pourra pas faire le lien entre cette friandise d’avant séance et la séance en elle-même.

Non, lorsque ton cheval attend à la porte du pré, ce n’est pas parce qu’il est content de te voir, mais peut-être que c’est une habitude qu’il a, car c’est par là qu’arrive la personne qui le nourrit ? Ou par ici que ses copains de pré reviennent ?

Ce qu’il faut réussir à se dire, c’est que les animaux n’ont pas les mêmes émotions ou sentiments que nous. Ils en ressentent, oui, et heureusement, c’est pour cela qu’on les aime après tout !

Article 20.3

C’est grave Docteur ?

Bien sur que non, ça se soigne ! Du moins, ça se corrige. Comme on l’a vu, l’anthropomorphisme, c’est le fait de prêter des sentiments humains à nos chevaux. Pour contrer cela, il faut “penser cheval”, dans sa globalité, pas uniquement sur une réponse à un moment donné.

Pourquoi ton cheval gratte le sol à l’aire de pansage ? Il peut avoir mal au pied, t’indiquer que quelque chose l’agace (une mouche ?), il s’impatiente car il en a marre d’être attaché, il attend son goûter,… Une multitude de réponses sont possibles et le but, c’est de se mettre à sa place et d’essayer de comprendre pourquoi il fait ce mouvement. Qu’est-ce qu’il cherche à dire à ce moment précis ? Par exemple, lorsque mon Loulou gratte le sol à l’aire de pansage, c’est soit qu’il attend son goûter, soit qu’il en a marre que je lui touche le haut de la tête pour démêler sa crinière ou lui mettre son collyre. En fonction de mon action et du moment où il le fait, je sais ce qu’il veut me dire et j’adapte ma réponse. Si c’est de l’agacement parce que je dois lui mettre son collyre, je calme la situation, je lui offre un moment câlin avant de reprendre son soin. Petit à petit, on apprend à connaître les habitudes des chevaux et on apprend surtout à mieux les interpréter.

Article 20.1

Vers un anthropomorphisme conditionné ?

Même si les dérives et extrêmes de chaque “mouvement de pensée” doivent être évitées, il serait judicieux de se poser les bonnes questions. Certes, un cheval n’est pas un humain mais ce n’est pas pour autant qu’il n’y a pas de similitudes à certains moments. Si quelqu’un t’agresse, tu vas te défendre ou fuir ? Le cheval réagit exactement de la même façon. Tout est une question d’équilibre. Il faut arriver à dompter sa pensée et son raisonnement afin de se poser les bonnes questions, celles qui vont nous permettre de mieux comprendre pourquoi son cheval réagit comme ça à ce moment-là, dans cet endroit-là, à cette heure-là.

L’approche holistique est de loin la meilleure et celle que je conseille. Elle qui consiste à voir son cheval d’une manière globale en prenant tout en compte : son alimentation, son environnement, son espace de vie, ses congénères, son travail,… Il n’y a que de cette façon que tu pourras juger réellement l’état de ton compagnon et réussir à faire la différence entre un comportement inhabituel anodin (comme par exemple un jour de flemme à cause de la chaleur), d’un comportement inhabituel suspect (comme un début de coliques par exemple). Demande-toi toujours pourquoi tu agis de telle ou telle manière. Pourquoi lui donner cette nourriture ? Pourquoi ne pas lui en donner ? Pourquoi lui mettre une couverture ? Pourquoi lui ferrer les antérieurs ? Pourquoi le longer en licol ? En répondant à ces questions, tu es déjà dans la bonne voie pour éviter un anthropomorphisme aigu ! 

Apprendre à connaitre son cheval est la première chose que tout cavalier devrait faire avant de lui monter sur le dos, ou de lui demander quelque chose. Et cela éviterait de trop nombreux anthropomorphismes ! 

« Faites du cheval un compagnon et non un esclave, vous verrez quel ami extraordinaire il est. » Nuno Oliveira

Pour aller plus loin :

 

6 réflexions sur “Réflexion #3 : l’anthropomorphisme ou la volonté de doter nos chevaux de sentiments.

  1. Il est vrai que l’on a vite tendance à interpréter le comportement de son cheval en mode « humain ». Je pense qu’au fond l’on souhaite se rassurer en ramenant les choses à ce que nous connaissons. Malheureusement, ça amène de nombreux problèmes et difficultés de penser ainsi.

    Pas toujours évident de regarder et interpréter les attitudes de son cheval de manière neutre et impartiale. Très bon article en tout cas, qui nous pousse à nous remettre en question, en recentrant vraiment le cheval dans notre réflexion.

    Aimé par 1 personne

  2. Un super article ! C’est bien de remettre les pendules à l’heure. Même quand on essaye déjà de ne pas tomber dans l’anthropomorphisme, une piqure de rappel de temps en temps ne fait pas de mal ! 🙂

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire